Photo : Juste avant une patrouille sur Grande Terre, l’équipe de Sea Shepherd et de l’ASVM. Novembre 2020

Nous réagissons suite à la publication d’un article du Journal de Mayotte qui stipule que Sea Shepherd rejoint une forme d’ “Union sacrée” dans la lutte contre le braconnage, sous la coordination du Conseil Départemental et à la demande de Jean François Colombet, Préfet de Mayotte. Nous démentons formellement cette information.

Si nous étions effectivement présents à la réunion de mardi dernier à l’initiative du Préfet, afin d’échanger avec les différentes parties prenantes et avec les autorités, nous avons été fort déçus de constater que cette réunion a fait la part belle aux déclarations d’intention, faisant taire toute critique envers l’attitude scandaleuse du Conseil Départemental ou mettant le doigt sur toute forme de dysfonctionnement. Au prétexte d’esprit constructif, la parole y était bâillonnée et il était mal venu d’aborder tout ce qui fâche. Autant dire que nous n’y avions guère notre place.

Suite à cette réunion, un point presse s’est tenu auquel Sea Shepherd n’a pas été convié. C’est de ce point presse que découle l’article du Journal de Mayotte que nous nous voyons contraints de rectifier, du moins pour les passages nous concernant.

“On ne peut rien construire de tangible sur la base de non-dits et de faux semblants” déclare Lamya Essemlali. “Nous ne sommes pas là pour faire des ronds de jambe. Nous voulons des résultats et les résultats, ça se mérite. Il faut aller les chercher sur le terrain, précisément ce terrain qui a été cédé aux braconniers depuis des années, précisément par ceux qui étaient censés l’occuper”.

Que ce soit à Mayotte ou ailleurs, nous avons pour habitude de nous unir uniquement avec des acteurs que nous pensons dévoués et sincères dans la lutte contre le braconnage. Nous n’avons aucune confiance -et osons le dire, aucune estime- pour le Conseil Départemental qui jusqu’ici n’a fait que la preuve de son incompétence totale et de sa complaisance coupable vis-à-vis des braconniers de tortues. Ce même Conseil qui embauche des braconniers notoires qu’il paye avec nos impôts et dont les gardiens sont éternellement absents au poste sur la plage de Moya.

“Les gardiens du Conseil Départemental payés pour faire des barbecues et dormir sur la falaise qui surplombe la plage de Moya ne manquent pas de moyens comme ils l’affirment, ils manquent de courage et de dévouement” déclare Lamya Essemlali Présidente de Sea Shepherd France.

1,4 million d’euros ont été débloqués pour protéger les tortues à Mayotte, à quoi a servi cet argent ? Les gardiens du Conseil Départemental devraient s’inspirer des bénévoles de l’ASVM qui n’ont pas un sou en poche et qui patrouillent bénévolement y compris sur les plages qui sont sous leur responsabilité. Ils devraient avoir honte et leur hiérarchie aussi.

Pourtant, c’est précisément au Conseil Départemental que Monsieur le Préfet a décidé de donner les rênes de la lutte contre le braconnage, sans même demander de comptes sur le bilan du dit Conseil depuis des années qu’il est en charge de protéger les tortues. Une erreur stratégique fondamentale de la Préfecture, à laquelle nous ne participerons pas.

Une réunion et des déclarations d’intention ne sont pas suffisantes pour effacer des années de laxisme et de complaisance face au braconnage. Surtout si ces problèmes ne peuvent même pas être mis sur la table. On ne fait pas disparaitre les problèmes en les passant sous silence. Cette “union” se fera donc sans nous.

Pour autant, nous ne faisons pas cavaliers seuls. Notre “union sacrée” existe mais elle est avec les bénévoles de l’ASVM qui sont les seuls à s’investir du crépuscule à l’aube, sur le terrain de façon régulière et totalement désintéressée. Elle est aussi avec certains agents de l’Etat qui malgré les difficultés, mettent du cœur à l’ouvrage pour tenter d’enrayer le braconnage sur l’île.

Sea Shepherd intensifiera ses patrouilles en 2021 sur Petite et sur Grande Terre, avec encore plus de moyens humains et technologiques. Nous partagerons également toutes nos données utiles avec certains agents clés (plus de 1200 patrouilles à ce jour, soit près de 15 000 heures passées sur les plages) dans le sens où celles-ci pourraient les aider à procéder à des arrestations. Nous ne nous doutons pas que des personnes de bonne volonté au sein des pouvoirs publics existent, encore faut-il qu’on leur donne les moyens d’agir et cela va de pair avec le fait de déloger les imposteurs.

Nous espérons donc que de vrais efforts seront enfin déployés, dans les bonnes mains, pour lutter contre le braconnage sur le terrain, au-delà des réunions en haut lieu qui font la part belle aux opportunistes. Les tortues n’attendent que ça. Et nous aussi.

Article du Journal de Mayotte : https://lejournaldemayotte.yt/2020/11/20/enfin-lunion-sacree-pour-proteger-les-tortues/