À Mayotte, sur la soixantaine de plages où viennent pondre les tortues, seules 4 sont surveillées par les gardiens du Conseil Général (CG) de Mayotte. Parmi elles, les plages de Charifou 1 et 2.

Nos équipes avaient jusqu’ici considéré ces plages comme non prioritaires afin de se concentrer sur les nombreuses plages livrées aux braconniers.

C’est donc avec étonnement et consternation que nous y avons découvert il y a quelques jours sur Charifou 1 et 2, une douzaine de carapaces de tortues braconnées et ce malgré la présence officielle de 9 gardiens du CG chargés d’assurer leur protection.

Que se passe-t-il avec les gardiens des tortues à Mayotte ??

L’année dernière, sur la plage Moya 1, nous avions découvert deux tortues fraichement braconnées (les braconniers encore présents avaient caillassé notre équipe et les gendarmes venus nous aider). Au petit matin, l’un des gardes en charge de la surveillance cette nuit-là avait dissimulé les cadavres des tortues tuées la veille sans les avoir signalées.

Cette année les gardiens ont officiellement renoncé à surveiller la plage Moya 2 car jugée “trop dangereuse” par leur nouveau responsable. Ce qui n’a pas empêché les gardiens d’y aller une nuit devant nos équipes, pour ramasser des coquillages sur leur temps de travail. Ils étaient équipés de lumières blanches, connues pour perturber les tortues, risquant de les pousser à retourner en mer sans avoir pondu et de lâcher leurs précieux œufs dans l’océan.

Autre problème : les tortues qui viennent pondre de nuit peuvent être longues à repartir au petit matin, ce qui allonge la durée de la garde. Nos équipes sont parfois contraintes de patrouiller les plages plus de 12 heures d’affilée. Certains gardiens de Moya 1, qui dorment dans leur cabane les nuits de patrouille n’ont même pas la patience lorsqu’ils descendent enfin sur la plage au petit matin d’attendre que les dernières tortues aient pondu. Il a été très frustrant pour nos équipes d’assister au comportement inadmissible de certains gardiens qui, pressés de rentrer chez eux, poussent du pieds des mamans tortues n’ayant pas encore pondu, pour les contraindre à quitter la plage.

Hier matin, notre équipe a retrouvé une tortue braconnée sur la plage de Moya 1, au nez et à la barbe des gardiens, juste en contrebas de leur cabane. Une fois de plus, ils étaient restés toute la nuit dans leur cabane.

Devant notre équipe, leur responsable leur a donné, par téléphone, pour instruction d’enterrer la tortue sans prendre la peine de la signaler au REMMAT (Réseau d’Echouage Mahorais de Mammifères marins et de Tortues marines) comme le voudrait la procédure. Une pratique qui semble courante chez certains gardiens et qui fait le jeu des braconniers, entrainant une importante sous-estimation du nombre de tortues tuées à Mayotte.

Les gardiens de tortues du Conseil Général sont rémunérés par nos impôts pour protéger cette espèce menacée et garante de la bonne santé du lagon. Si parmi ces gardiens, certains tentent honnêtement de faire leur travail, beaucoup d’entre eux ne sont pas dignes de la mission qui leur est confiée.

Les tortues n’ont aucune chance, si même les gens payés pour les protéger se rendent complices de leur massacre en ne prenant pas leur rôle au sérieux et en camouflant les cadavres.

Il est primordial que tous ceux qui constituent ces équipes fassent preuve de conviction et de passion, à l’instar des bénévoles mahorais de l’ASVM et des volontaires de Sea Shepherd qui prennent sur leur temps et sur leurs deniers personnels pour protéger les tortues et l’avenir de Mayotte.